Portraits d’intérieurs
Papiers peints, tapis et rideaux, tableaux, miroirs, fleurs et tasses de thé… L’ exposition Portraits d’intérieurs présente les différents espaces de la Villa Sauber revisités et mis en scène par cinq artistes contemporains.
Marc-Camille Chaimowicz, Danica Dakic, Brice Dellsperger, Nick Mauss et Laure Prouvost renouvellent notre perception de l’ancienne demeure du peintre anglais Robert Sauber, en puisant dans un répertoire de formes empruntées à la littérature, à l’histoire de l’art, à la scène ou au cinéma.
Portraits d’intérieurs est née de la rencontre, au sein d’une collection privée, de deux pièces réalisées par Marc Camille Chaimowicz et Nick Mauss, hommages respectifs au poète, metteur en scène et réalisateur Jean Cocteau, et à son génial décorateur Christian Bérard.
Derrière une coulisse constituée de feuilles décor en contreplaqué se déploie l’installation Jean Cocteau… : une chambre imaginaire du poète, inspirée du décor des Enfants Terribles et composée de panneaux de bois peint, de tapis, de meubles et d’objets divers fabriqués ou récoltés par Marc Camille Chaimowicz. Répartis dans l’ancien salon de la Villa Sauber, ces éléments composent un décor d’intérieur bourgeois surrané proche du “théâtre de la chambre” imaginé par Cocteau, mêlant memorabilia et références à l’histoire des arts. En relation avec cette installation, Marc Camille Chaimowicz met en scène un choix d’œuvres de la collection du NMNM, sous tendu par le lien de Jean Cocteau aux Ballets Russes et à la Principauté de Monaco. Les dessins éthérés de Christian Bérard pour Cotillon, La Septième Symphonie et Les Forains côtoient Le Grand Dieu Pan, une pièce unique de céramique réalisée par Jean Cocteau pour le théâtre du Cap d’Ail et présentée pour la première fois au NMNM.
La pièce de Nick Mauss intitulée Concern, Crush, Desire, reprise d’une antichambre décorée par Christian Bérard en 1939 pour l’Institut Guerlain des Champs Elysées, constitue un écrin de velours jaune et appliqué de coton pour les œuvres choisies dans les collections du NMNM. Les dessins de Nick Mauss dialoguent avec différents projets de mises en scènes : les décors conçus par Pavel Tchelitchev pour le ballet Ode, une maquette annotée de Natalia Gontcharova pour le décor de La Péri, mais aussi deux photographies de Constantin Brancusi saisissant Lizica Codreanu dansant dans l’atelier sur les Gymnopédies de Satie, ou encore les dessins de Jean Cocteau représentant Bérard grimé et déguisé en travesti.
La dimension théâtrale de ces pièces d’intérieurs, et la confusion de l’espace d’exposition avec l’espace scénique, trouvent un prolongement dans cinq installations vidéo.
Produite par la Tate Britain à l’occasion de l’exposition “Schwitters in Britain”, l’installation vidéo Wantee de l’artiste Laure Prouvost invite les spectateurs à pénétrer dans la cabane de “Grandad” (son grand-père fictionnel), un artiste conceptuel supposément proche de Schwitters, dont la compagne Edith Thomas était surnommée “Wantee”. Dessins, peintures, sculptures, céramiques et éléments de mobilier composent le décor de cet étrange lieu de vie et de création, interrogeant la nature et la fonction de l’art.
L’installation Isola Bella, conçue par l’artiste Danica Dakic est annoncée par trois posters surplombant une vitrine contenant les accessoires d’un spectacle : huit masques en papier, et une série de notes manuscrites, composant vraisemblablement des indications de jeu. Le titre Isola Bella est emprunté à un décor panoramique de papier peint créé par la manufacture Züber en 1842. Durant deux semaines, une reproduction de ce papier peint a été installée dans le foyer pour personnes handicapées de Pazaric en Bosnie, transformant une petite salle de spectacle en un décor de cinéma. Sur ce fond d’île paradisiaque, les résidents du foyer deviennent les acteurs de courtes mises en scènes dans lesquelles ils interprètent et improvisent leur propre vie.
En reconstituant librement les décors de certains films cultes, le plasticien Brice Dellsperger réalise des remakes qu’il rassemble sous le titre générique de Body Double. Au sein d’une même image évoluent plusieurs personnages interprétés le plus souvent par l’artiste lui-même, filmé sur un fond vert puis ostensiblement incrusté dans un décor factice. Les personnages semblent flotter dans le décor, s’en détacher dangereusement et prêts à basculer dans l’image.
Brice Dellsperger présente ici trois vidéos, dont le Bodydouble 29, réalisé en 2013 et acquis par le NMNM grâce au mécénat d’UBS.
A l’occasion de l’exposition Portraits d’Intérieurs, le NMNM produit une publication accompagnée de cinq posters conçus par les artistes.
La Villa Sauber présente une nouvelle boutique, proposant notamment papiers peints d’artistes, éditions et céramiques.
Pendant la durée de l’exposition, l’aménagement du Salon de Lecture est confié à Antoinette Poisson, entreprise parisienne de décoration spécialisée dans la restauration et l’édition de papiers peints dominotés. Trois modèles de papiers dessinés, imprimés et peints selon les techniques traditionnelles du XVIIIème siècle seront spécialement réédités pour être mis en relation avec les boîtes de dévotion conservées au NMNM.
Commissaire de l’exposition : Celia Bernasconi