Selon George Condo, « l’Humanoïde n’est pas un monstre de science-fiction, c’est une forme de représentation qui utilise des moyens traditionnels pour faire remonter les émotions profondes à la surface d’une personne ». L’idéal mimétique qui prévaut pour la peinture ancienne a fait naître un nombre incalculable de représentations « semblables », « comparables » aux humains. Seules toutefois quelques rares effigies ont accédé au stade d’«humanoïdes », à celui de « golem » sur le point de prendre vie. Les portraits de Rembrandt sont de ceux-là.
Qu’en est-il d’une peinture moderne pour laquelle la « vérité » du médium (l’abstraction) a supplanté un projet réaliste que l’invention de la photographie avait rendu caduc ? Relevant le défi, George Condo a tiré la peinture moderne vers le « presque humain ». Il a repris le problème à sa source : s’est emparé du Cubisme, en a inversé les intentions ; l’a humanisé. Il s’est fait le tenant d’un « cubisme psychologique », a voulu voir dans les déformations de Picasso ou de Braque, non pas l’avènement d’une « peinture pure », mais une exploration réaliste de la psyché humaine. Ce faisant, Condo place ses pas dans ceux de Fénéon qui, visitant l’atelier de Picasso au temps des Demoiselles d’Avignon, conseille à celui qui était encore un jeune artiste de se vouer à la caricature. Condo creuse ce sillon, plaçant la déformation cubiste au même niveau que celle des caricaturistes : une façon singulière de réinventer la Figuration.
Au fil de six chapitres, l’exposition retrace la continuité d’une œuvre foisonnante qui va des « extra-terrestres » au bottin mondain, de Guido Reni à Bugs Bunny. Ponctuée de peintures réalisées spécialement, l’exposition ouvre aux regardeurs les portes de la fabrique, aussi folle qu’érudite, des Humanoïdes.
Commissaire : Didier Ottinger Scénographe : Christophe Martin